Un exemple en matière de bonne gouvernance
Le Botswana est régulièrement cité en exemple par les institutions de Bretton Woods, du fait de son orthodoxie financière dans la gestion des ressources tirées de son exploitation diamantifère et minière.
En effet en juin 2022, le pays a abrité une conférence internationale sur la bonne gouvernance, organisée par le FMI et son Institut de Formation pour l’Afrique, avec pour thème : « Gouvernance et responsabilité en Afrique : progrès accomplis et défis à venir ». Dans ses propos liminaires, la Directrice générale adjointe du FMI, Antoinette M. Sayeh a cité le Botswana en exemple en le félicitant de la mise en place « d’un cadre politique adéquat pour gérer avec prudence les ressources nationales ». Tout en soulignant le parcours accompli par le pays depuis son indépendance, elle a noté les efforts consentis dans la mise en oeuvre d’un cadre favorisant la lutte contre le blanchiment des capitaux.
Cette gestion scène des finances publiques a des conséquences directes sur la croissance du pays et sur sa capacité à affronter les crises. Avec un PIB annuel de 19.18 milliards de dollars en 2022, le pays est classé par la Banque mondiale dans la catégorie des pays à « revenus intermédiaires de la tranche supérieure », classement qu’il détient depuis plusieurs années. Avec une population d’un peu plus de 2.5 millions d’habitants, le pays a selon le FMI, connu en 2021 un retour de croissance de l’ordre de 11.8% , après une chute de 8% en 2020, du fait de la crise de covid qui a fortement baissé ses entrées en devises.
Un secteur des services très pourvoyeur d’emplois
La particularité du Botswana par rapport à plusieurs autres pays sub-sahariens disposant de richesses minières et pétrolières, est sa capacité à ne pas laisser son économie reposer entièrement sur le secteur industriel dont les tendances du marché fluctuent au gré des conjonctures et dont les ressources ne sont pas infinies. En effet, le pays a compris l’importance d’investir dans le secteur des services qui représente de loins la principale source de création de richesses. Ainsi, ce secteur contribue à hauteur de 63.6% du PIB et emploie 62.5% de la population active, selon les données récentes de la Banque mondiale. Ce secteur est principalement dominé par un secteur financier en pleine croissance puisque la Bourse du Botswana (BSE) est l’une des plus performantes du continent. Le pays a également de fortes ambitions en matière de tourisme et transport. En effet, le tourisme qui représente déjà 11% du PIB et emploie 7.1% de la population en âge de travailler, compte bien se positionner en leader sur le continent.
Une économie toutefois encore fortement dépendante du secteur industriel
Gaborone dispose aussi d’un important secteur industriel notamment grâce à l’exploitation de diamant qui représente 90% de ses exportations et 35% de ses recettes fiscales issues du secteur industriel. Le Botswana est en effet le deuxième producteur de diamant au monde et dispose d’une réserve de charbon de l’ordre de
212 milliards de tonnes. Ces dernières années, le secteur minier a représenté 18% du PIB du pays, hors période Covid. Mais avec la mise en place d’une politique de transformation locale du diamant, des bovins, et du textile, le pays a connu une forte valeur ajoutée, puisque le secteur de l’industrie représente aujourd’hui 29.7% du PIB et emploie 17.6% de la population active.
En revanche, à cause de sa faible croissance démographique, de la rareté des terres arables du fait de l’avancée du désert, la production agricole est très faible puisqu’elle ne représente que 2% de son PIB mais emploie tout de même 19% de la population active, selon les données de la Banque mondiale. Par ailleurs, le secteur de l’élevage de bovins représente à lui seul 80% du PIB tiré de l’agriculture. Le secteur manufacturé ne représente que 6% de la richesse annuelle produite.
Dans le même temps, le secteur public représente un poids de l’ordre de 16% du PIB annuel, ce qui reste un coût non négligeable.
La crise de covid a fortement impacté l’économie du pays
Le Botswana est l’un des pays qui a le plus souffert de la crise sanitaire en Afrique. Son économie a en effet été fortement impactée du fait de l’arrêt complet du tourisme et d’un très fort ralentissement de demande en diamant. Ainsi, le pays a connu plus de 8 points de déficit budgétaire avec un PIB qui s’est retrouvé à 14.93 milliards de dollars.
Dans le même temps, il a fallu augmenter les dépenses publiques malgré une masse salariale déjà exorbitante. En effet, le pays a dû investir dans un plan très couteux, visant à accompagner les menaces et les entreprises pendant la crise. Cet effort budgétaire lui a coûté 2 points du PIB. Mais avec la reprise de l’activité économique mondiale, l’exercice budgétaire 2021-2022, a connu un retour de croissance dû a la forte demande du marché en diamant et en ressources minières. Ainsi, le déficit budgétaire creusé pendant la crise a baissé pour atteindre 2.7% du PIB.
Un recours à la dette très maitrisé
Malgré que le pays ne retrouvera l’équilibre budgétaire qu’en fin de cette année, il a su contenir sa dette publique, qui a tout de même augmenté de 5 points entre 2019 et 2023 pour atteindre aujourd’hui 21% du PIB. Cette maîtrise de l’emprunt est dû au fait que le gouvernement a préféré puiser dans ses importantes réserves stratégiques, gérées par un Fonds souverain, afin de ne pas systématiquement recourir à l’emprunt. Ainsi, seul le plan de relance a nécessité le recours à l’emprunt. D’ailleurs avant la crise, le pays n’avait pas recours à l’emprunt extérieur, même de manière occasionnelle.
Plusieurs défis à venir
Si le Botswana brille par sa gestion relativement scène des finances publiques, plusieurs défis sont tout de même à relever. Le chômage doit en être la priorité. Le pays a connu un taux de chômage de 20% l’an dernier, un chiffre constant qui contraste avec le taux de croissance. Ce contraste met en lumière de fortes inégalités dans le pays. En 2015, le taux de pauvreté touchait 15% de la population active, un chiffre que le pays risque de rattraper à nouveau s’il ne met pas en place des réformes structurelles indispensables.
Par ailleurs, le pays doit davantage réduire le poids du secteur public qui mobilise 16% du PIB. Il faut donc penser à une restructuration profonde de l’administration. La crise de covid a permis de mettre en lumière la vulnérabilité de l’Etat lorsque l’économie du pays est très dépendante d’une ressources épuisable. C’est pourquoi, le pays doit davantage renforcer le poids du secteur des services dans la part du PIB.
Nous finirons cette analyse par une dernière donnée qui fait aussi la particularité du Botswana. Alors que la plupart des pays africains ont comme partenaires économiques privilégiés la Chine ou les pays occidentaux, le Botswana exporte en priorité aux Emirats-arabes-unis et ne dépend tout aussi pas des importations chinoises ou occidentales puisque c’est son grand voisin du sud, l’Afrique du Sud qui inonde principalement son marché. A titre d’exemple, le commerce entre la France et le Botswana a reculé de 10 points en 2021 pour atteindre seulement 35 millions d’euros. Par ailleurs, il est resté autours de 73 millions d’euros en moyenne entre 2017 et 2019.
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